Que penser du lait…? (4)

Suite des articles
Que penser du lait…? (1)

Que penser du lait…? (2)
Que penser du lait…? (3)

Il est maintenant temps d’essayer de tirer quelques conclusions de tout ça. Quand j’écris « Le lait », comprendre « Lait et produits laitiers », par soucis de faire bref.

Le lait, est-il un aliment indispensable ?
Le lait humain est sans doute indispensable aux enfants, avant de varier l’alimentation. Il est même probable que l’on arrête de donner le sein trop tôt dans nos civilisations. Le lait des autres animaux n’est pas indispensable, en témoigne les populations asiatiques qui semblent coupler non consommation de produits laitiers avec une santé de fer.

Le lait, un aliment remède ?
Oui ! Il semblerait les laits traditionnels apportent un plus à la flore bactérienne, par exemple. On peut faire sans le lait, certes, mais il apporte certains avantages. En parlant de flore bactérienne, il est possible que le lait cru protège en partie des désavantages du seigle (gluten) consommé chez les fameux suisses étudiés par Weston A. Price (comme quoi la nutrition est aussi une affaire de combinaison alimentaire).

Le lait, un aliment globalement nocif ?
Il semblerait que le lait qui pose problème soit le lait moderne. J’appelle lait moderne, le lait qui a subi au moins une des transformations en vigueur. Le lait traditionnel (cru et provenant d’animaux sains) ne présente apparemment pas les tares associées à la surconsommation de lait moderne. Le lien avec l’ostéoporose ne semble concerner que les consommateurs de lait moderne. Weston A. Price n’a pas trouvé de personnes âgées atteintes d’ostéoporose, échantillon trop petit, ou tout simplement le lait traditionnel a peu à voir avec l’ostéoporose ? Toutefois, il ne faut pas ignorer la pertinence de la prise de vitamine D (voir plus bas) qui aide à l’assimilation du calcium. On sait que les peuples traditionnels passent plus de temps que nous dehors, et donc bénéficie du soleil, et des effets associés de la vitamine D.

Le lait est pourtant un aliment du néolithique ?
Oui. L’humain n’est pas « censé » en consommer. Pourtant, les populations ayant consommé ou consommant du lait traditionnel se portent bien. De même les pommes de terre (bouillies !) ou le riz blanc – qui a la particularité d’être raffiné, transformé d’une certaine façon – aliments tout aussi néolithiques sont consommés par des populations qui ne souffrent pas des maux de civilisation.

On peut donc consommer du lait cru à souhait ?
Si vous ne présentez pas de sensibilité particulière, par exemple à la protéine du lait (caséine), ou d’intolérance au lactose qui, de fait éloigne du lait cru brut sortant à même de l’animal, normalement, il n’y a aucun souci. Pour les intolérants au lactose, il faudra se tourner vers les laitages fermentés, étant entendu que la fermentation doit normalement éliminer le lactose. Certains yahourts entiers provenant de lait moderne (et particulièrement pasteurisé) peuvent ne pas avoir éliminé intégralement le lactose, par exemple. D’autres problèmes marginaux peuvent apparaître, c’est à chacun de savoir ce qui est bon pour soi.

Et concernant l’hygiène…le lait cru n’est-il pas porteur de bactéries ?
Oui et plein ! Pourtant, les hommes semblaient s’en accommoder jusqu’avant le 20ème siècle. Et au contraire, depuis qu’on fait la chasse aux bactéries, on devient moins résistant à celles-ci, puisqu’on est peu mis en contacts avec celles-ci. Ainsi, la recommandation des médecins d’éviter le lait cru pour les femmes enceintes (surtout pour l’enfant porté) me semble me semble de bon sens…dans le contexte actuel. Dans l’absolu, cela me semble une hérésie que de favoriser un aliment transformé au profit d’un aliment brut, a priori plus sain. Dans le doute, peut-être éviter le lait cru pour les femmes enceintes. Mais normalement, il ne devrait pas en être ainsi. C’est bien parce que l’on est devenu trop « hygiéniste » que les bactéries posent problèmes.

Quelques doutes, toutefois ?
C’est le lien du lait avec le cancer. Les populations étudiées par Weston A. Price vivaient dans un contexte traditionnel. Peu ou pas pollué. Peu ou pas de stress. Un univers sain en quelque sorte, les autres aliments étant bruts eux aussi. Contrairement à ce que pense Jean-Marie Bourre, je pense que l’IGF-1 est bel et bien utilisé par l’organisme humain. Ne serait-ce que pour la taille des individus. Thierry Souccar l’explique bien : le lait fait grandir. Ceux qui consomment le plus de lait…sont les plus grands. Les américains, les suédois, les hollandais. A contrario, les populations asiatiques ne consommant pas de lait sont plus petites. Seulement, on pourrait penser que seul le lait moderne apporte bien plus d’IGF-1 que le lait cru. C’est probablement le cas. Mais la quantité d’IGF-1 n’est pas nulle. En témoigne le peuple Masai où les individus inférieurs à 1,80 m sont rares.

Leur taille moyenne peut être un indice comme quoi l’IGF-1 du lait cru agit bel et bien. Sans doute pas seulement : l’exclusion de certains produits raffinés (qui peuvent diminuer la taille) peut aussi expliquer cette taille, après tout l’on sait que nos ancêtres du paléolithique étaient plutôt grands. Toutefois, un petit doute subsiste dans mon esprit : ces Masai me semblent bigrement grands. Est-ce que la consommation de lait cru traditionnel peut malgré tout, dans notre contexte moderne (alimentation, pollution, etc.) être un stimulant du cancer ? Pourquoi pas, en tout cas, je ne rejette pas totalement cette hypothèse. J’interprèterais ça, comme un indice de revoir son alimentation et ses habitudes de vie de manière globale.

Les aberrations de consommation et de production, quelles sont-elles…?
La tyrannie des calories frappe encore et toujours. Méfiez-vous de ces laits enrichis en vitamine D mais écrémés entièrement. Totalement inutile, la vitamine D a besoin de ces graisses pour être utilisées par le corps -on écrème donc le lait, qui contient de la vitamine D…pour en rajouter de manière artificielle ?? -. Concernant la vitamine D, et les autres micro-nutriments, le lait traditionnel en est bien plus pourvu ! Le lait moderne n’est pas loin pour moi de n’être que des calories vides. La plupart des produits laitiers conventionnels sont à éviter. En supermarché, en France, on peut toutefois se procurer facilement du fromage à base de lait cru. A priori, en général, ce sont des fromages issus de vaches (ou chèvres ou…) correctement nourries, mais je ne saurais en être totalement certains ! J’ai fait part ici, de la difficulté à trouver du beurre au lait cru : je pense comprendre pourquoi, le beurre est un peu…malheureusement, un sous-produit laitier. Si les vaches produisent du fromage (par exemple camembert) en Normandie, elles ne produisent pas autre chose. Si c’est du lait pasteurisé et écrémé d’un côté, on aura la récupération de la crème, du beurre battu…pasteurisé. C’est toute la filière qualité du lait et des produits laitiers qui est à revoir. Hélas…le mouvement de retour au lait traditionnel, je ne le sens pas venir, même pas de loin. Cela ne concerne que quelques éleveurs accrochés aux anciennes méthodes, et à des consommateurs hyperconscients de la nocivité du lait moderne.

Ma conclusion très personnelle :

Il était amusant pour moi de mettre en relief des avis totalement opposés sur un sujet franchement controversé et de tenter d’en dégager une synthèse, sans rejeter a priori les apports des uns et des autres. Au final, je suis assez d’accord avec les conclusions de Thierry Souccar. Mais il faut préciser que celles-ci s’appliquent au lait moderne. Je suis assez d’accord, si on veut, avec l’opposition de Jean-Marie Bourre. Mais il s’y prend mal à mon sens. Il n’insiste pas assez sur la qualité du lait. De sorte que le lait pasteurisé, homogénéisé, uppérisé provenant de vaches nourries au grain (!) quand ce n’est pas aux farines animales (!!) soit aussi bon pour la santé que le lait cru de chèvre prisé par les Masai. Une fois de plus, c’est la filière de Weston A. Price représentée par sa fondation, les propos de Ron Schmid, Carol Vachon, ou Taty Lauwers qui apportent une clé de compréhension, assez ultime, je trouve.

Toutefois, j’ai la sensation d’avoir effleuré, caressé le sujet…Difficile de tout aborder, je pense par exemple à l’acidité du lait (même cru) dans le sang, problème qui ne se pose pas si l’alimentation est équilibrée, donc en évitant au maximum les céréales comme le blé ou le maïs et en privilégiant les légumes, et pourquoi pas les fruits. J’ai peut-être fait quelques contresens scientifiques, sur l’IGF-1, dont je n’ai pas très bien compris si c’était l’hormone de croissance en elle-même, ou une stimulatrice de l’hormone de croissance. J’ai essayé de vulgariser au maximum. Pas évident non plus, cela passe par la compréhension, et la synthèse des auteurs et leurs ouvrages, il y a nécessairement des détails parfois utiles qui passent à la trappe. Ce quatrième (et dernier !) article me semble aussi quelque peu redondant avec le troisième. N’hésitez pas à me corriger via les commentaires.

A vous de poursuivre dans les livres référencés et à rajouter si on veut se faire une opinion : Lait de vache, blancheur trompeuse, Soyons moins lait, avec de nombreuses recettes. Utilisez Amazon. Google. Votre médiathèque regorge peut-être de ces bouquins ou même d’autres.

Je suis aussi assez abasourdi devant le peu de reconnaissance du lait cru (ou traditionnel) par les scientifiques français. Comme je disais, pour avoir connaissance du lait cru et de ses bienfaits, c’est la filière anglo-saxonne qui m’en a donné les clés. Même quelques requêtes google sur les controverses associées au lait, et donc des sites plutôt bien faits (comme celui-là, i-dietetiquepro) n’abordent pas la question du lait cru : cela n’existe tout simplement pas. Assez incompréhensible qu’un gars aussi cultivé que Jean-Marie Bourre (si si, lisez son bouquin) n’en fasse que très peu mention, comme si c’était un détail. De même Thierry Souccar est, je suis certain au courant de la distinction lait cru/lait pasteurisé. Peut-être n’est-ce qu’un détail qui pour lui n’invalide pas les conclusions de son ouvrage ? Mystère et boule de gomme.

Pour ma part, ma consommation de laitages se limite au fromage et au beurre. Mes produits phares sont le Comté, le Cantal, le Roquefort, le Bethmale (mon chouchou). De cette manière, j’ai du mal à atteindre la limite « dangereuse » de 3 à 4 laitages par jour…Le lait cru de base, même pas en pensée, je suis intolérant au lactose. J’ai eu le malheur d’ingérer du yahourt au lait entier en le pensant libre de lactose, j’ai vite compris que ce n’était pas le cas. Sans doute du lait pasteurisé…Je pourrais faire un peu d’effort, et tenter de trouver des laitages crus fermentés comme du kéfir ou du yahourt (pas le même que celui qui m’a causé des soucis intestinaux hein !), pourquoi pas. C’est juste que la filière est artisanale, parfois il faut faire quelques centaines de kilomètres pour trouver un fermier qui en fait. Pauvre France, tu t’énorgueillis des labels rouges, des labels bio, mais la transformation du lait n’est pour toi qu’un détail, voire un bienfait pour l’hygiène.

7 commentaires sur “Que penser du lait…? (4)

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  1. Très intéressant
    Concernant l’intolérance au lactose, il semblerait que la nature ait pourvu le lait (animal du moins) de lactase, mais que cet enzyme serait détruit par la chaleur… Ainsi le lait cru pourrait être digéré par tout un chacun. Pour moi l’expérience est ok (alors que le lait pasteurisé passe « moyen »)… à vous de voir 🙂

  2. Oulà les commentaires Amazon pour le livre de Bourre sont pas fameux (votre avis pourrait être utile…) !
    Seule info intéressante, quoique son interprétation ne soit pas univoque encore une fois : Dr « Bourre est dans un conseil scientifique de Danone »

    La vérité est ailleurs

    ps : dommage que Seignalet n’ait lui non plus pas abordé la question du lait cru !

    1. Disons qu’en soit il ne m’a pas convaincu que Souccar avait tort, mais on y apprend quand même des choses (bon, là, la lecture date, et n’ayant pas le livre sous la main, j’ai pas d’exemple, sinon les premiers chapitres sur l’histoire du lait, la mythologie, etc.)

      1. Autre différence – de taille – entre lait cru et chauffé : le premier est alcalinisant alors que le premier est acidifiant… j’aurais tendance à penser que les aliments alcalins sont bénéfiques a priori (même si c’est simpliste… en tout cas ça met la puce à l’oreille)

  3. La consommation de lait (cru) aura quand même amené quelque chose d’important à l’humanité : la tuberculose…

    Je ne sais plus où j’ai lu une description des conditions de vie des vaches élevées en plein Paris il y a quelques siècles : entassées dans des bâtiments et des caves sans lumière, malades, sales, leur lait était si plein de bactéries qu’il fallait le faire bouillir avant de le boire, pour ne pas mourir de sa consommation…

    1. Oui bien entendu je ne fais que référence au lait cru de vaches élevées de manière traditionnelle, en pâturages, au vert.
      J’ai lu le bouquin de Pierre-Olivier Fanica, et oui, c’est pas de ce lait cru là que je parle. Mais c’est bien, parce que ça montre que l’industrialisation de l’alimentation remonte à bien plus loin que l’après-guerre.

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